Par Julian Assange, le 30 juillet 2013
Aujourd’hui Bradley Manning, un lanceur d’alerte, a été condamné par un tribunal militaire à Fort Meade (Maryland, USA, ndt) sur 19 chefs d’accusation pour avoir fourni des informations à la presse, dont cinq inculpations pour "espionnage". Il fait désormais face à une peine maximale de 136 ans de réclusion.
La charge de "secours à l’ennemi" n’a pas prospéré. Elle n’avait été incluse, semble-t-il, que pour rendre l’appellation du journalisme comme "espionnage" acceptable. Cela ne l’est pas.
Les dévoilements allégués à Bradley Manning ont exposé des crimes de guerre, déclenché des révolutions, et induit des réformes démocratiques. Il est le lanceur d’alerte dans sa quintessence.
Ceci est la première condamnation pour espionnage d’un lanceur d’alerte de l’histoire. C’est un précédent dangereux et un exemple de l’extrémisme sécuritaire national. C’est un jugement myope qui ne peut être toléré et doit être renversé. Cela ne peut simplement pas être que la communication d’informations au public soit de "l’espionnage".
Le président Obama a initié davantage de procédures à l’encontre des lanceurs d’alerte que tous les autres présidents réunis.
En 2008 le candidat à la présidence Obama fit campagne sur une plateforme qui encensait les lanceurs d’alerte comme étant courageux et patriotes. Cette plateforme a été totalement trahie. Le document de sa campagne décrivait les lanceurs d’alerte comme des vigiles face aux abus des gouvernements. Il a été retiré d’Internet la semaine dernière.
Tout au long de cette procédure il y a eu un absent de taille: une quelconque victime. L’accusation n’a pas fourni la moindre preuve – ou même allégué – qu’un seul individu ait été blessé suite aux révélations de Bradley Manning. Le gouvernement n’a jamais cherché à dire que M. Manning travaillait pour une puissance étrangère.
La seule "victime" a été l’orgueil blessé du gouvernement US, mais l’abus sur ce brave jeune homme n’a jamais été la façon de le restaurer. Les abus infligés à Bradley Manning ont plutôt laissé au monde un sens de dégoût sur les profondeurs dans lesquelles a sombré l’administration Obama. Ce n’est pas un signe de force, mais de faiblesse.
Le Juge a permis à l’accusation d’apporter des modifications substantielles aux charges pesant sur Manning après que la défense et l’accusation aient plaidé leur affaire, autorisant 141 témoins pour l’accusation et des témoignages extensifs à huis-clos. Le gouvernement a gardé Manning dans une cage, l’ont déshabillé et isolé dans l’espoir de le briser, un acte formellement condamné par le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la torture. Ceci n’a jamais été un procès équitable.
L’administration Obama a érodé intentionnellement les libertés démocratiques aux USA. Avec le verdict rendu aujourd’hui, Obama en a taillé beaucoup plus. L’administration est déterminée à dissuader et taire les lanceurs d’alerte, à affaiblir la liberté de la presse.
Le premier amendement à la Constitution US dit que "Le Congrès n’émettra pas de loi… réduisant la liberté d’expression, ou de la presse". Quelle est la partie du mot "pas" qu’Obama ne parvient pas à comprendre?
Source: http://wikileaks.org/Statement-by-Julian-Assange-on.html